« D’you need helpu? »
Oui, s’il vous plaît. Vous êtes vraiment
gentille de me l’offrir, je vous remercie du fond du coeur.
J’ai traîné mes deux grosses valises et mon
sac à partir de l’aéroport jusqu’ici, la station Shin-Nihonbashi, où je suis en
retard pour mon rendez-vous à l’agence de location.
« So heavy!!!!! You very strong
woman!!! How you got here all alone!! »
Oui. J’ai 15 heures de vol et une heure de
train dans le corps, j’ai la nausée, je veux dormir, je sue (il fait
30 celcius ici) et je suis fâchée « en tas... ».
À Tokyo, probablement comme ailleurs, si
vous traînez une charge trop lourde pour vous, on ne vous aidera pas. Que vous
soyez paraplégique et schizophrène en pleine crise d’épilepsie n'y change rien
(non, je ne parle pas de moi). Les gens passent à côté de vous sans rien dire.
Ce qui est bizarre de Tokyo, c’est qu’à la
place de faire semblant qu’ils n’ont rien vu (et donc qu’ils ne vous viendront
pas en aide), les gens vous fixent, parfois même avec un air de dégoût.
« Yark... une fille qui sue en tirant ses valises! Tiens-toi loin! ».
Alors quand ma madame de pas plus que 100
lbs (j’suis généreuse) a rebroussé chemin juste pour m’aider, j’avais quasiment
les larmes aux yeux.
Ça c’était hier. J’ai dormi à l’air
climatisé et aujourd’hui est un autre jour.
Mon quartier est vraiment beau, comme je
m’en doutais quand j’ai choisi mon guesthouse sur le site de l’agence. C’est
dans le quartier Shinanomachi, le quartier olympique. Ce matin, j’ai justement
été prendre une marche autour du stade olympique. Ça grouillait de gens qui
venaient à leur pratique de baseball, de course, de natation, de soccer, etc.
.. D’ailleurs, hier dans le taxi entre l’agence et mon guesthouse, j’ai
découvert qu’à la tombée de la nuit, autour du palais impérial, des centaines
de Japonais sortent faire du jogging. Ça court, ça court, ça court! Sur des
kilomètres et des kilomètres, dans un quartier normalement plutôt vide sauf
pour les fonctionnaires, les trottoirs étaient noirs de gens en t-shirt et
shorts.
Quand je suis partie de Montréal, il
faisait autour de 10 degrés. Ici, il fait 32 degrés, ce midi. Et des degrés
« à la japonaise », ce qui veut dire que l’humidité fait en sorte que
vous vous sentez comme dans une serre. Bientôt, je deviendrai une tomate
(surtout si je ne mets pas de crème solaire).
D’ailleurs, il faut croire que la crème
solaire a mauvaise presse ici. Vous le savez peut-être : au Japon, c’est
la blancheur de la peau qui est considérée belle, et non pas le fait d’être
bronzé. Les Japonaises réussissent à rester blanches à l’année en portant des
blouses à manches longues et des gants même dans des températures comme ce
matin...
Moi, j’ai opté pour une robe d’été longue,
à manches courtes. Rose pétant. Quelle erreur!
...
Et oui, au Japon je suis une minorité
visible. Il y a moins de 1% d’immigrants au Japon, et près de 90% d’entres eux
viennent de pays asiatiques, donc ils ne sont généralement pas, à proprement
dire, des minorités visibles.
Moi, je le suis. Et j’aurais pu laisser
faire les vêtements voyants pour ma première journée ici... J’ai l’impression
de remplacer le panda au zoo d’Ueno, des fois...
J’ai fini par trouver un parc complètement
vide pour manger mon bento, mais les rares passants réussissaient encore à me
fixer. Ça a été « le boutte de la marde » quand j’ai fait une partie
de « qui sera le premier à cligner des yeux » avec une famille au
complet. Les enfants me fixent, les parents me fixent, moi je les fixe :
wow! Un vrai film de Leone!!!
All that in Japan!!!!!
(Cause I’m big in Japan, oh oh, didn’t you
knooooow? )
Et comme tout gaijin qui en parle à ses
amis Japonais, ceux-ci vous regardent avec un air ahuri et disent :
« se faire fixer?! Mais non, tu dois rêver! Les Japonais sont habitués de
voir des étrangers! ». Yeah, sure...
Et de toute façon, un gaijin qui se fait
pas fixer, ça existe pas. Mais who cares, dans 3 jours je serai habituée.